samedi 31 janvier 2009

Extrait (la dette)

cet extrait vient après un dialogue père-fils qui illustre simplement le processus de création de l'argent (argent-dette).

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Évidemment, ce dialogue simplifie la problématique. Et pourtant, comme l'a dit JK Galbraith, économiste canadien qui fut conseiller de Kennedy, « le processus par lequel les banques créent de l'argent est si simple que l'esprit résiste à y croire ». Il parle bien entendu du système de réserves fractionnaires (le « x fois ») que nous avons esquissé ici et qui, pour être tout à fait juste, n'est pas systématiquement critiquable en soi. Ce système n'est qu'un outil. Avant de chercher à le changer, voyons quelles mains l'utilisent. Hélas, ces mains sont celles des banques privées, soit commerciales que vous connaissez bien pour en être client, soit centrales et jusqu'à la plus puissante d'entre elles, la « Fed » (Federal Reserve, banque centrale des États-Unis). Les décideurs monétaires du monde sont en effet des institutions privées et autonomes, pour la plupart en quête de profit ; et ceci ne va pas sans certaines conséquences... En voici trois.

Première conséquence : même pour un pays riche comme la France, la dette est injuste. Aujourd'hui, dans notre pays, le « service de la dette » (paiement du principal et des intérêts) est le deuxième budget de dépense de l'Etat, après l'Education Nationale et avant la Défense, soit en 2006, 40 milliards d'euros par an. Regardons comment s'est créée cette dette.

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Extrait (l'usine à consentement)

cet extrait se situe dans le chapitre à propos de "l'usine à consentement"
la référence à Noam Chomsky y est clairement exposée. Mais on va ici un peu plus loin...

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On ne peut pas vraiment manipuler « en direct » l'usine à consentement. A l'inverse de la propagande, qui attend tranquillement l'histoire officielle pour la répéter, elle a une certaine inertie et des rouages compliqués. On a donc cherché à tirer le meilleur parti du filtre, en l'alimentant avec de l'information dimensionnée selon le tamis. C'est ainsi qu'est né le « story telling » (« racontage d'histoire »), pour servir d'organe de direction à cette grosse mécanique. L'idée est d'injecter dans le système une histoire, la plus facile à comprendre que possible, de préférence accompagnée d'images, et à laquelle le public saura s'identifier. Cette histoire pré-mâchée va vivre une vie faite de buzz et de réactions émotives, et, quand le coup est réussi, distillera le message voulu. Lire la lettre de Guy Môquet comme on l'a fait récemment en France, c'est du story telling, et tout le contraire d'une analyse (qui était son auteur, quelles étaient ses luttes, pourquoi a-t-il été fusillé, par qui, dans quelles conditions ?). Une pensée unique aussi molle que prévisible a émergé du filtre à consentement, à propos d'une espèce de patriotisme du sacrifice, de devoir de mémoire, de respect dû aux combats des anciens.

La guerre contre le terrorisme (transcription imparfaite du war on terror américain, qui serait plus justement traduit par « guerre contre la terreur ») est, à bien des égards également, du story telling. Il faut dire que de dramatiques images sont tombées d'elles-mêmes dans les mains de nos dirigeants, un certain 11 septembre 2001, pour lesquelles l'usine à consentement a fonctionné à plein régime. Consentement au patriot act, ensemble de lois liberticides pour des citoyens américains innocents du drame. Consentement, plus tard, à l'invasion de l'Irak... pays qui n'a jamais eu aucun lien de quelque ordre avec Al Qaïda. Là, il a aussi fallu raconter une histoire de photos satellites montrant ce qui aurait pu être des armes de destruction massive... dont tout le monde savait que l'Irak était dépourvu.

On peut donc, certes indirectement, manipuler l'usine à consentement. Souvenez-vous : elle filtre l'information et fait émerger ce qui est vendeur, facile à comprendre pour le consommateur-débile, et qui ne compromet pas les intérêts des maîtres (Halliburton ou Nestlé, par exemple). C'est ainsi que la machine fabrique du consensus mou sur tout un tas de sujets.
Nous allons nous attarder sur une rhétorique courante ces derniers temps, et voir sa mécanique, parce qu'elle est en lien direct avec tout ce qui précède. Il s'agit pour le pouvoir de faire croire que sur tous les pans de l'économie ou de la société, le secteur privé fait systématiquement mieux que le service public. Le but est bien entendu de faire grossir le domaine marchand. Mais tout n'est pas dit.

  • Hôpital contre cliniques privées : on oublie d'expliquer la politique tarifaire, les caisses-pivots qui gèrent de manière inique les remboursements, la sélection des malades...
  • École publique contre école privée : on oblitère les moyens publics alloués au privé (article 89 de la loi Libertés et responsabilités locales, rémunération des professeurs, subventions) et, là aussi, la sélection à l'entrée...
  • Poste contre sociétés de transports : chacun découvrira en temps et en heure l'impact d'une privatisation sur le service rendu et sur le prix. Sans parler des conditions de travail et de la baisse du service en communes rurales.
  • Politique publique de l'énergie contre libéralisation des marchés : on ne nous explique toujours pas comment les investissements seront rentables à la fois pour les actionnaires et pour le consommateur.
  • Solidarité contre assurance... on met entre parenthèses rien de moins que le modèle de société et ses sources historiques.
C'est un véritable exploit que d'en être arrivé à faire autant se résigner les gens.
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la suite est l'analyse d'un cas concret : la privatisation annoncée de l'Ecole

présentation du livre

"Le monde est à l'heure de toutes les crises : économiques, sociales, environnementales. Il est temps pour beaucoup de s'ouvrir enfin à lui et de découvrir, tels des voyageurs, de quoi il est fait et comment nous en sommes arrivés là. Bien sûr, le monde est vaste et les itinéraires possibles nombreux. En voici un qui va vous conduire sur les chemins de l'argent, des média, des multinationales... de bien des réalités que l'on éclipse mais qui façonnent le monde palpable, le monde réel."

Le livre est construit comme un parcours dont le point d'arrivée serait cette pensée de l'écrivain John Le Carré :

« Selon la définition de Mussolini, on est en bonne voie vers un état fasciste quand on ne peut plus distinguer le pouvoir économique des multinationales du pourvoir gouvernemental ou politique. Si vous ajoutez à ça le pouvoir religieux et le pouvoir médiatique, vous avez la définition de notre présent. »